Le Cirque Plège, dirigé par Antoine Plège fut, de l’avis général, le cirque le plus populaire de France durant la deuxième partie du XIXème siècle.
Un héros de père
Antoine-Prosper, dit Antoine Plège était né à Boulogne-sur-Mer le 2 mai 1831. Il était le fils de Joseph-Nicolas Plège et de Françoise née Flutiaux.
Son père, né à Troyes, en 1808, était un personnage extraordinaire. Ayant découvert très tôt sa vocation d’artistes de Cirque, il s’était enrôlé dans une troupe de danseurs de corde. Il se distingua, en 1826, à Lyon par un acte de bravoure. En effet, Il sauva de la noyade deux jeunes ouvrières tombées dans le Rhône. L’année suivante, il fut encore un héros à Chinon, quand il intervint, au risque de sa vie, lors d’un incendie. À chaque fois, il fut dûment félicité, remercié et décoré.
Au Cirque Lalanne
En 1834, il était au programme du Cirque Lalanne à Rouen puis, fut engagé dans la troupe Vidal et Robba. Il eut encore l’occasion de prouver sa bravoure à Alençon : en mars 1836, alors que la Halle aux grains était la proie des flammes, il sauva deux pompiers. Et, deux mois plus tard, toujours dans la même ville, il renouvela le même exploit.
Joseph-Nicolas Plège travailla longtemps en Grande-Bretagne, en tant que danseur de corde, notamment chez Astley dirigé par Ducrow en 1836, au Cornwall Circus, chez Hillier, Batty, Cooke, Ginnett, Wallet ou Henry Brown, jusqu’en 1858. Entre temps, il s’était produit à Bruxelles en 1846.
Né sur le Voyage
Né sur le Voyage, Antoine Plège, dès l’âge de six ans, monta sur la corde et apprit son métier d’artiste. Il fut également acrobate, équilibriste et écuyer. Au Cirque Bouthors, il rencontra Joséphine Angèle Jourdan (née en 1837), la fille adoptive de Louis Bouthors, une belle écuyère âgée de seize ans. Ils se marièrent et eurent quatre enfants : Antoinette, André, Jeannette et Lucie Andrée.
En 1859, Antoine Plège décida de fonder son propre cirque. Dans son ouvrage Sur le chemin des grands cirques voyageurs, Paul Adrian situe ses débuts à Beaumont le Royer dans l’Eure. De son côté, son frère, dit Plège Aîné, monta également son propre établissement avec une troupe importante puisqu’elle comprenait 40 artistes et 20 chevaux.
Au fil du temps, Antoine Plège réussit à monter une troupe digne de ce nom. Pendant l’été 1871, à Poitiers, il présentait les voltigeurs équestres Victor Bouthors, Justin Loyal, Bertolletti et miss Howards. Antoine Plège eut ensuite un revers de fortune et dut vendre son matériel. Mais, il ne se laissa pas abattre et repartit à zéro en travaillant en palc. En 1975, il mit à f’affiche Le camp du Drap d’or, une grande manoeuvre seigneuriale. L’année suivante, il put engager des artistes comme les gymnastes Simon et Galea.
Les constructions en bois d’Antoine Plège
Antoine Plège devint le locataire, lors de la saison 1880-1881, du Cirque du Midi boulevard Jamar à Bruxelles, une construction en bois de 35 mètres de diamètre, que la Ville louait à différents directeurs comme Siegrist-Ducos ou Oscar Carré. La troupe était composée des extraordinaires jockey Clarke et du de clown dresseur Félix Gontard avec ses chiens et ses chats. Le spectacle se concluait par La Maffia, une pantomime en 5 actes. Il donna ensuite des représentations à Gand.
Après Chalons sur Saône, où il avait présenté La fête de la nuit dans la capitale du céleste empire, il réussit à s’installer à Lille en septembre 1881. Il mit à l’affiche la célèbre Miss Lala de la troupe Kaira et une reconstitution historique : La mort du général Kléber.
Le succès fut tel, qu’il put se produire à nouveau dans cette ville en 1885 avec La Grande Chasse Pompadour et La chasse au Cerf, et en 1888, Une fête à Ronchin.
Dans les villes de France
Dans toutes ces villes, il faisait ériger des constructions en bois. Il s’établit à Roubaix et Dunkerque en 1882. Il revint dans cette cité du Nord en 1884, 1887, 1889 et 1891. Antoine Plège s’installa à Limoges en 1884, à Amiens en 1885, à Gand en 1886, au Havre, Besançon et Gand, avec Miss Lala en 1887, et à nouveau à Gand en 1889.
Son établissement avait acquis une enviable notoriété, et il put donner des représentations à Lyon, cours du midi, du 26 septembre au 16 octobre 1889. Dans ses mémoires, Théodore Rancy écrivait : « … Mon concurrent le plus redoutable était toujours Plège. Il parvenait à monter des spectacles équivalents aux miens avec pantomimes, féeries, ballets et figuration… »
Des attractions internationales
Avec plaisir, Antoine Plège retourna à Gand en 1891. À Orléans, en juin, il mit à l’affiche le fameux ours écuyer Caviar présenté par François Rugo, et une pantomime comique aquatique Le Cirque sous l’Eau. Ce spectacle avait été monté par Gougou Loyal. À Poitiers, il avait engagé le célèbre clown anglais Billy Hayden, l’athlète Godard, l’acrobate à cheval Guillaume Bedini et les acrobates Frediani. La troupe équestre des 7 Rowland était la vedette à Dunkerque.
L’année suivante, Antoine Plège retourna au Havre, Limoges, Poitiers. Il investit également le Cirque-Théâtre d’Angers (ex- Cirque Napoléon).
Puis, Antoine Plège vécut une année faste en 1893. Outre des villes comme Orléans, Chalon sur Saône, Elbeuf et Grenoble, il fit la conquête de Nantes, Bordeaux et Troyes. Il fit construire aux Quinconces, un cirque en bois de trente mètres de diamètre, avec des écuries pouvant abriter cinquante chevaux.
À Troyes, il fit ériger à l’extrémité du Mail Saint-Nicolas, une construction en bois de 39 mètres de diamètre, de 1 200 places. Enfin, Nantes devint une de ses villes favorites. Il y sera invité tous les ans. Il se préoccupait du confort de ses spectateurs et avait fait installer un système de chauffage alimenté par une chaudière à vapeur. Il inscrivit à son programme des artistes de classse internationale comme Spessardy et ses ours de Russie.
Une figure populaire du Cirque
Le directeur Antoine Plège en 1894 séjourna Nantes, Angers, Rennes, Le Mans, Le Havre avec en vedette la fabuleuse troupe cycliste Ancillotti. L’année suivante, il partit à l’assaut de Caen, Tours, Amiens, Nancy et Nantes. Il continua, en 1896, à Limoges, Pau et Nantes.
En 1897, il s’installa à Nancy, Caen, Perpignan, Bordeaux, Marseille du 27 août au 29 septembre avec en vedette Miss Athleta, la femme la plus forte du monde, et Nantes, où il présenta la pantomime Paris-Saint-Pétersbourg. Pour Bordeaux, il avait engagé la trapéziste Etta Gozzini, les trapézistes volants Loret et Labatut, François Fratellini qui tournait le saut périlleux à cheval et ses frères Luigi et Paolo dans leur entrée comique.
Alors qu’il était à Toulouse, Antoine Plège décéda le 18 février 1898. Le Cirque français venait de perdre une de ses plus figures les plus populaires.
Assistée de ses enfants, Joséphine, sa veuve, reprit la direction du cirque. Lorsqu’elle décéda en 1903, son fils André, marié avec Alice née Trotman, prit sa succession. L’année suivante, Antoinette et son mari Henri Despard montèrent le Cirque Despard-Plège. Puis, Ugo Ancillotti qui s’était marié avec Lucie, dirigea à partir de 1908 le Cirque Ancillotti-Plège.
Dominique Denis
Sources
-
Un héros de père
- Dossiers chronologiques de l’auteur.
- Notes pour servir à l’histoire de la famille Plège – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 18.
- Victorian Arena – John Turner.
- Cirques en bois, cirques en pierre de France – Charles Degeldère et Dominique Denis.
- Né sur le Voyage
- Dossiers chronologiques de l’auteur.
- Notes pour servir à l’histoire de la famille Plège – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 18.
- Courriers Plège Aîné – 1865 – 1867.
- Sur le chemin des grands cirques voyageurs – Adrian – p 29 à 32.
- Cirques en bois, cirques en pierre de France – Charles Degeldère et Dominique Denis.
- Cirque Plège – Le journal du Morbihan – 28/03/1875.
- Les constructions en bois
- Histoire illustrée des cirques à Bruxelles – Jean-Léo – p 65-66.
- Cirques en bois, cirques en pierre de France – Charles Degeldère et Dominique Denis.
- Gent Circusstad – André De Poorter – p 63-64.
- Sur le chemin des grands cirques voyageurs – Adrian – p 29 à 32.
- Programmes des Cirques en France de 1860 à 1910 – Alain Simonet – p 42-43.
-
Famille Plège – T. Rémy – Le Cirque dans l’univers – n° 18.
- Théodore Rancy et son temps – 1818-1892 – Jacques Garnier – p138-139.
- Cirque Plège – Le journal de Roubaix – 04/05/1882.
Sources – suite
- Des attractions internationales
- Gent Circusstad – André De Poorter – p 63-64.
- Cirques en bois, cirques en pierre de France – Charles Degeldère et Dominique Denis.
- Forains d’hier et aujourd’hui – Jacques Garnier – p 140-141.
- Le Cirque à Bordeaux – collectif – p 35-36.
- Forains d’hier et aujourd’hui – Jacques Garnier – p 140-141.
- Programmes Plège – 1881 – 1882 – 1885 – 1887 – 1888 – 1890 – 1891 – 1893.
- Antoine Plège, une grande figure du Cirque
- Programmes Plège 1894 à 1898
- Der Artist 1895 – 1896 – 1898.
- Le Nouvelliste – 12/10/1897.
- Le cirque Ancillotti – Alain Nenert.
- Figures de cirque – Alfred Court – Le Cirque dans l’univers – n° 27.
- Acte de décès de Joseph-Antoine Plège.
- 30 ans de cirque par Louis Lavata – Souvenirs recueillis par Michel Murray – Le Quotidien – 8/12/1930.
- Grand Répertoire Illustré des Cirques en France – Robert Barrier – Crépy en Valois – 1997.
- Programmes des Cirques en France de 1860 à 1910 – Alain Simonet – Arts des 2 Mondes – Paris – 2000.
- Sur le chemin des grands cirques voyageurs – Adrian – 1959.
À lire
- Cirques en bois, Cirques en pierre de France – Charles Degeldère et Dominique Denis – Art des 2 Mondes – Paris – 2002-2003. (en cours de réédition).
- Sur le chemin des grands cirques voyageurs – Adrian – 1959.