Alfred Court acrobate : La première vocation de cette star internationale du Cirque fut d’être un artiste de force et d’adresse, d’abord barriste, puis casse-cou, athlète au tapis et perchiste.
Un enfant de Marseille
La vie de cet artiste exceptionnel est d’une telle richesse, qu’elle mérite d’être évoquée en plusieurs parties.
Marie, Alfred, Charles, Léon Court, dit Alfred Court naquit le 1erjanvier 1883 à Marseille. Il était le dernier d’une famille bourgeoise de dix enfants. Son père, Marie, Gabriel, Joseph, Esprit Court, appelé aussi Court-Payen, et sa mère Eugènie, née Clapier, dirigeaient une savonnerie. Son frère Marie, Joseph, Jules, dit Jules Court, était né le 24 juillet 1880.
Pendant son enfance Alfred Court eut l’occasion de voir de nombreux spectacles de cirque comme ceux de Sam Lockart, du Cirque Français de Léon Doux, de Buffalo Bill et son Wild West Show, de Plège ou Ducos. Il fit ses études chez les Jésuites du Prado, puis fut inscrit dans une école de commerce. Adolescent, passionné de vélo et de gymnastique, il fréquentait le gymnase La Phocéenne. En plus, il s’entrainait à la barre fixe chez un des ses camarades qui possédait dans le jardin de ses parents un jeu de trois barres fixes.
Les débuts d’Alfred Court acrobate
Il fit la connaissance du barriste Alfred Lexton au gymnase La Phocéenne en 1898. Impressionné par son talent, celui-ci, qui était un barriste renommé, lui proposa d’entrer dans son numéro.
Le jeune Alfred Court s’enfuit de la maison paternelle pour aller débuter en tant qu’artiste au Cirque National Suisse, dirigé par le Capitaine Léon Martin installé à Montpellier. Comme il n’avait pas encore seize ans, ses parents firent appel aux gendarmes qui le ramenèrent à Marseille.
Une fois sa seizième année arrivée, le 4 janvier 1899, Alfred avertit ses parents qu’il les quittait pour embrasser la vie d’artiste. Son premier engagement en tant que barriste avec Lexton, eut lieu au Casino de la jetée-promenade de Nice.Il prit comme nom d’artiste : Egelton. Le numéro aux trois barres de Lexton et Egelton, qui durait huit minutes, était composé d’une entrée à deux, puis de quatre passes exécutées individuellement. Alfred tournait un saut périlleux twisté de la première à la troisième barre, en passant par-dessus la deuxième, avec un double saut périlleux en sortie. Un peu plus tard, il réalisait ce fameux passage, avec un saut périlleux arrière.
Les rois de la barre fixe
Lexton et Egelton reçurent plusieurs propositions d’engagement, et furent engagés au Cirque Cristiani, à Bayonne, puis à Bordeaux au Cirque du Quai de la Grave. Au cours d’une représentation, au mois de juin, Alfred Court, fut victime d’une chute, alors qu’il exécutait le passage de la première à la troisième barre.
Son ami Lexton qui avait décidé de retourner en Allemagne pour monter un nouveau numéro avec son ex-partenaire Roeder, le laissa seul. Alfred Court monta un court numéro en solo et tourna quelques mois avec une troupe théâtrale qui jouait Le voyage de Suzette. De retour à Marseille, Alfred embaucha un copain d’enfance, monta un nouveau numéro de barres fixes, et réussit à se faire engager au Belvédère de Tunis. Il rencontra ensuite Féfé Gavazza, un excellent gymnaste et fit équipe avec lui, puis son frère Jules entra dans le numéro.
Les Egelton réussirent à s’imposer et furent programmés dans de grands établissements européens comme Plège à Lille. Encore une fois, Alfred Court acrobate fut encore victime d’accidents, comme au Palais de Cristal de Marseille, où il eut un genou démis et un bras cassé. A l’Apollo de Kœnigsberg, il fit une dangereuse cascade sur la nuque, et resta une demi-heure sans connaissance.
Alfred Court acrobate, casse-cou, porteur et perchiste
A partir de 1904, Jules et Alfred Court décidèrent de devenir directeurs de cirque. Un article particulier leur sera consacré.
Travailleur infatigable, Alfred se transforma en casse-cou. Il créa une nouvelle attraction, inspirée du looping the loop, créé par W. H. Barber, qu’il dénomma le S infernal. Il s’agissait d’une structure en forme d’S, d’une dizaine de mètres de hauteur, qu’il dévalait, à vive allure, sur un vélo de son invention surmonté, sur le dessus, de trois roues, deux à l’avant et une à l’arrière. Il présenta ce numéro au Cirque Egelton installé dans une construction en bois à Perpignan.
Alfred Court acrobate reprit son numéro de barres fixes. Il accepta un contrat de trois ans au Cirque Pinder de 1905 à 1908, où il rencontra l’écuyère Renée Vasserot qui allait devenir sa femme. Née le 20 juin 1886, elle était la fille d’André Vasserot, le fondateur de cette grande famille équestre, et de Marie-Jeanne Thomas.
Les rois des airs
Ce passage chez Pinder terminé, Jules Court devint impresario et monta à Marseille l’Agence Artistique Internationale, tandis qu’Alfred continuait son numéro de barres en Algérie, Tunisie et Espagne. En 1909, au Cirque Egelton à Marseille, il monta spécialement, avec son ami Edmond Rainat, un numéro aérien combiné de trapèzes volants et de barres, animé par dix participants : Les Jupiter, Jules Court et Albert, Alfred Court et Alfred Lexton, le trio Rainat et La Corsari.
Avec son épouse Renée et son élève Louis Vernet, dit Petit Louis, Alfred Court acrobate monta un nouveau numéro de mains à mains en voltige qu’il appela les Orpington.
Dans Les Histoires de Cirque de James-Lewis Pinder, dit Arthur, Jacques Garnier écrivait : « …Ils faisaient tous les trics possibles en rattrape d’une seule main, saut périlleux d’un pied arrivée une main dans une main, flic flac des épaules de Renée arrivée sur une main courbette partie du dos, arrivée sur une main, saut périlleux en arrière « twist » et rattrapé en équilibre sur une main, d’autres encore dont l’arraché du sol en souplesse d’une seule main… »
Alfred Court acrobate en Amérique
Après ses succès, Alfred Court fut engagé au fameux Wintergarten de Berlin en 1913, puis l’année suivante au Cirque Ringling en Amérique du nord.
Les Orpington passèrent l’hiver à Cuba au Circo Pubillones, puis retournèrent chez Ringling. Alfred Court acrobate monta également un numéro de perche avec son voltigeur Petit Louis. Alfred portait sur l’épaule uneperche de 12 mètres tandis que son voltigeur effectuait des poses acrobatiques. Ils occupaient la piste centrale de Ringling, tandis que sur les autres pistes et plateaux se produisaient les Mirano, les Anderson, les Jahn et les Rodriguez.
Contrats sur contrats
L’équipe retourna au Cirque Pubillones en 1916. Alfred Court apprit le décès, tombé au champ d’honneur de son ex-partenaire et ami Alfred Lexton, qui s’était engagé dans la Légion Etrangère en 1914.
Il resta dans ce cirque jusqu’au 2 mars 1919, date à laquelle éclata une révolution. Pubillones licencia son personnel et les artistes retournèrent aux Etats-Unis d’Amérique pour rejoindre le Ringling Bros Circus à Chicago.
Il séjourna aux U. S. A. ainsi qu’au Mexique et en Amérique centrale jusqu’en 1919. Puis retourna en France en 1920, son voltigeur Petit Louis étant resté au Mexique.
Enfin, Alfred Court acrobate remonta un numéro avec Renée et un nouveau partenaire Lucien Goddart.
C’est alors qu’il entama une nouvelle carrière de directeur de Cirque qui sera décrite dans un prochain article.
Dominique Denis
Sources : Alfred Court acrobate
- Un enfant de Marseille
- Mémoires d’Alfred Court – Alfred Court.
- Coulisses et secrets du cirque – Henry Thétard.
- Dictionnaire illustré des mots et locutions du Cirque – Dominique Denis.
- Les débuts d’Alfred Court acrobate
- Mémoires d’Alfred Court – Alfred Court.
- Mes débuts comme professionnel – Alfred Court – Le Cirque dans l’Univers – n° 28.
- Coulisses et secrets du cirque – Henry Thétard.
- Les rois de la barre fixe
- Mémoires d’Alfred Court – Alfred Court.
- Mes débuts comme professionnel – Alfred Court – Le Cirque dans l’Univers – n° 28.
- Cirques en bois – Cirques en Pierre – Charles Degeldère & Dominique Denis – Tome 1.
- Ils donnent des ailes au cirque – Adrian – p 111.
Sources – suite
- Alfred Court acrobate, casse-cou, porteur et perchiste
- Mémoires d’Alfred Court – Alfred Court.
- Attractions Sensationelles – Adrian.
- Les Comiques à Bicyclette – Dominique Denis.
- Les Histoires de Cirque de James-Lewis Pinder, dit Arthur – Jacques Garnier.
- Le cirque à Perpignan au début du siècle – Le Cirque dans l’Univers – n° 84.
- Du cirque, du vrai cirque – Alfred Court – Le Cirque dans l’Univers – n° 16.
- Les rois des airs
- Cirques en bois – Cirques en Pierre – Charles Degeldère & Dominique Denis – Tome 1 et 2.
- Les Zoo Circus des frères Court – 2 volumes – Dominique Denis.
- Alfred Court acrobate en Amérique
- Mémoires d’Alfred Court – Alfred Court.
- Du cirque, du vrai cirque – Alfred Court – Le Cirque dans l’Univers – n° 16.
- Cirques en bois – Cirques en Pierre – Charles Degeldère & Dominique Denis – Tome 1 et 2.
- Les Zoo Circus des frères Court – 2 volumes – Dominique Denis.
À lire
- La cage aux fauves – Alfred Court – Éditions de Paris – Paris – 1953
- Les Zoo Circus des frères Cour – Dominique Denis – Arts des 2 mondes – 2 volumes – Paris – 2004 (en cours de réédition)
- Mémoires d’Alfred Court – Alfred Court – Arts des 2 Mondes – Paris – 2007 (en cours de réédition)