Jacques Tourniaire fut le promoteur du Cirque sur le continent européen, de la France à la Russie, dans la première moitié su XIXème siècle.
Par Dominique Denis avec la collaboration de Peter Bräuning, Paul Salasca et Hermann Saguemüller.
Sur les routes de France
Jacques Tourniaire, le fils de Louis Tourniaire (écrit également Tournière) et de Madelaine – selon l’orthographe de l’état civil – Maugiron, marchands ambulants, était né à Grenoble le 17 octobre 1772. Il avait un frère Louis II. Dans sa famille, nous trouvons encore, Joseph né en 1783 et Charles né en 1784.
Devenu artiste de cirque, Jacques Tourniaire se maria avec l’écuyère Philippine Barbe Louise Catherine Rödiger (née en 1782 à Leipzig, en Saxe) fille du montreur d’animaux Rödiger. Selon Vera Jennskens-Beulen, ils eurent une fille Sophie née en 1799.
Les débuts de la troupe Tourniaire
Le premier passage connu de Jacques Tourniaire, à la tête d’une troupe, date du 14 décembre 1800 à Stuggart.
À Lyon, le 11 novembre 1801, naissait son fils Benoît. Sa fille Marie Louise naquit le 13 octobre 1802 à Bordeaux.
Nous retrouvons Jacques Tourniaire et sa compagnie le 30 septembre 1804 à Amsterdam où naquit Henriette, le 30 septembre. L’année suivante, il se produisit à Gand (en mars), Francfort-sur-le-Main, Strasbourg (le 8 juin) et Berne en Suisse.
Dans les Etats Italiens
En perpétuel mouvemement, Jacques visita les Etats Italiens. A Rome, en 1808 naissait sa fille Adelaïde Marie Claudine.
Il séjourna à Milan en Lombardie où naquit Jean Marie Louis François, dit Louis, le 7 novembre 1809. Le mois suivant, la troupe se produisait à Bologne. Le 24 août 1811, naissait à l’Aquila dans les Abbruzes, Julie Félicie, dite Félicité ou Giulia.
En 1812, selon l’arbre généalogique de Vera Jennskens-Beulen, naquirent – à une date non précisée – Louis Denis Tourniaire ainsi que François Tourniaire.
De la Scandinavie aux Etats Germaniques
Ensuite, Jacques Tourniaire partit au Danemark et à Saint-Pétersbourg.
De son côté, son frère Louis II voyageait avec sa propre entreprise. Louis parcourait les Etats Italiens, en 1816, avec une troupe importante. Puis, Louis arriva à Munich en avril, et termina l’année à Dinkeshlbulh.
Après Augsbourg, Jacques Tourniaire présenta trois cerfs dressés à Ludwigsbourg en juillet 1816, puis à Stuggart en août. Comme celle de son frère Louis, sa troupe comptait 20 personnes et son écurie 30 chevaux. Il se faisait annoncer comme étant un cavalier d’art de la Royal School of London.
Un rhinocéros et un hippopotame
Il acquit, par la suite, un rhinocéros qu’il présenta à Francfort en octobre.
Comme la ménagerie du roi Frédéric de Wurtemberg était à vendre, après son décès le 30 octobre, Jacques Tourniaire se rendit acquéreur d’un éléphant, de singes et de perroquets.
A son programme, il ajouta une pantomime La mort de Marlborough. Il se produisit ensuite à Bamberg en novembre et au Schütt de Nuremberg, en décembre 1816. La ménagerie s’enrichit encore avec un hippopotame, une autruche, un pélican, et un gnou à queue blanche.
Acrobaties équestres et pantomimes
À Nuremberg, le spectacle de janvier 1817 était animé par les acrobaties équestres de madame Tourniaire et monsieur Lepicq… Louis Foureaux dansait sur la corde… L’intrépide cerf traversait un pont en feu, intitulé le Pont de l’enfer… Pour le final, la troupe effectuait d’impressionnants sauts à la batoude.
Début février, la troupe de Jacques Tourniaire interpréta une grande pantomime Mars et Vénus sur l’île de Cythère avec une chasse à deux cerfs et des feux d’artifices. Ensuite, fut donné La Mort du héros Marlborough.
Cette année naquit à Grenoble Ernest Jean Joseph Bachigaloupi Tourniaire.
De Copenhague à Nuremberg
La compagnie se déplaça ensuite à Ratisbonne (Regensburg) puis à Copenhague. A Hambourg de juillet 1819 à octobre 1820, Jacques Tourniaire s’associa avec Gustav Price.
La troupe de Jacques Tourniaire à Nuremberg, en juin 1821, s’était encore agrandie et comptait 30 personnes, avec une cavalerie de 40 chevaux.
Benoît Tourniaire et Carl Devaux brillèrent dans leurs exercices équestres. Louise Tourniaire dansa une Ecossaisesur deux chevaux. La petite Adelaide fit ses débuts dans une série de sauts acrobatiques. Louis Foureaux interpréta une danse solo anglaise sur la corde et madame Baptiste Foureaux fit de même avec une Provençale et la danse des Cendrillons. Quant à Baptiste Foureaux, qui se faisait appeler le Grotesque aérien, il émerveilla le public avec ses sauts au tremplin.
À Vienne
La société équestre Tourniaire, après Berlin et Leipzig s’établit au Circus Gymnasticus de Vienne en mai et juin 1822.
Le spectacle était toujours animé par les Foureaux à la double corde, l’écuyère Louise Tourniaire en compagnie de ses frères et soeurs.
Toujours dans la capitale autrichienne, Jacques Tourniaire mit à l’affiche, en octobre, la pantomime Timour le Tartar.
Le Cirque Olympique de Tourniaire à Breslau
Le manège Meitzen de Breslau (Wroclaw) accueillit, du 2 février au 20 avril 1823, Jacques Tourniaire qui dénomma son établissement Cirque Olympique.
L’écuyère Adelaide sautait par-dessus huit rubans. Louis Foureaux dansa La sabotière à cheval, puis le pas des Incas.
Parmi les nouveaux venus on pouvait apprécier : Joseph Gautier (le fils de Jean-Baptiste, le chef de la célèbre lignée) dans le rôle du paysan hollandais à chevalet dans ses sauts prodigieux au tremplin espagnol par-dessus 24 grenadiers. La partie comique était assurée par Joseph Biberger. La pantomime s’intitulait Les voleurs dans les Abruzzes avec un chien bulldog sautant au travers d’un feu d’artifices.
Saut périlleux au trampoline espagnol
Il y eut plusieurs changements de programmes avec, en mars, de nouvelles pantomimes comme Le chevalier Bayard, ou Le triomphe de Diane. Louise Tourniaire, costumée en orientale dirigeait l’éléphant de la ménagerie.
Joseph Gautier, en avril, tourna un saut périlleux à partir du trampoline espagnol par-dessus un l’éléphant et son cornac. Quant au jeune Benoît Tourniaire, Hippolyte moderne, il brilla dans sa course sur trois chevaux sans selle ni bride.
Encore une autre pantomime le 14 avril : La libération d’Alceste, puis le 16, Le décès du héros Marlborough.
Un cheptel impréssionnant
À Dusseldorf, au mois de mai 1823, Jacques Tourniaire présenta uniquemment sa ménagerie. On pouvait y voir un lion, un gnou, des serpents géants, et d’autres petits animaux et oiseaux.
Jacques Tourniaire s’installa ensuite à Strasbourg au mois de novembre, et à Stuggart du 30 novembre à 13 décembre. La ménagerie abritait un un gnou, un lion, un ours blanc, un castor, un raton laveur, une collection de singes et de volatiles.
Le 16 février 1824 naissait, à Lille, Ferdinand Auguste Mathias Tourniaire.
En France, Jacques Tourniaire revint à Strasbourg dans l’ancien marché aux vins, en juin et juillet 1824. Son cheptel était composé d’un éléphant, un rhinocéros d’Afrique, un lion, un tigre, un ours blanc, deux lynx, un corbeau de Laponie.
Jacques Tourniaire en Russie
En 1826, Jacques Tourniairei s’établit, avec sa troupe, à Moscou dans le manège de Pashkov, puis à Hambourg en juillet. À Saint-Pétersbourg, Jacques Tourniaire demanda à l’architecte Smaragd Shustov de lui construire un Cirque Olympique près du canal de Fontanka. Il y passa l’hiver du 11 décembre1827 jusqu’au mois de mai 1828.
Après ses succès en Russie, il retourna à Copenhague puis dans les Etats Germaniques. Le 14 janvier 1829, Jacques Tourniaire décédait à Koenisberg (Kaliningrad).
Son cirque fut repris par sa veuve Philippine. Le nom de Tourniaire continua de briller pendant de nombreuses années dans tous les pays européens.
Dominique Denis
avec la collaboration de Peter Bräuning, Paul Salasca et Hermann Saguemüller
Sources
- Actes de baptême et actes d’états civils – recherches de Paul Salasca.
- Alain Nénert : Arbre généalogique
- Arbre généalogique par Vera Jennskens-Beulen.
- Circus and Allied Arts – Circus und Artverwandte Künste – Peter Bräuning.
- Tourniaire – Alessandro Cervellati – Circo – janvier 1992.
- Staatsarchiv Ludwigsburg – Francfort / M – Nuremberg
- Theaterzeitung – Wien.
- Stadtmuseum Berlin.
- Bibliothèque universitaire de Wroclaw.
- Staatliche Museen – Dresden.
- Mecklenburgisches Landeshauptarchiv, Schwerin.
- Souabe Chronicle – Stuttgart.
- Straßburger Wochenblatt.
- Gent Circusstad – André de Poorter.
- Journal de Saint-Pétersbourg – 1928.
- Artisten Lexicon – Signor Saltarino.
- La Merveilleuse Histoire du Cirque – Henry Thétard – p 89.
- Grand Répertoire Illustré des Cirques en France – Robert Barrier – p 234.
- Dictionnaire du Cirque – Dominique Denis.
- Circus Archeologie – Hermann Saguemüller.
- Cirkus i Danmark – Anders Enevig.
- Fabuleuses Affiches de Cirque – Dominique Denis
- Premiers cirques en Russie – Dominique Denis – circus-parade.com
- Notes Jean Baudez.
- Unterwegs mit wilden Tieren. Wandermenagerien zwischen Belehrung und Kommerz 1750 –1850. Annelore Rieke-Müller – Lothar Dittrich.
- Une Tourniaire peu connue : Félicité – Tristan Rémy – Le Cirque dans l’Univers – n° 42.
- The Guise Family – Tourniaire Circus – Home Page.