par Belmonte Bates
Fascinant tout autant les fauves que les messieurs, la troublante Nouma Hawa obtint un succès phénoménal au Cirque d’Hiver de Paris, le 29 janvier 1882.
Troublante Nouma Hawa
Nouma Hawa : Une brune superbe, à la prestance majestueuse… C’est en ces mots qu’elle fut décrite par Henry Thétard dans son livre Les Dompteurs. Cette troublante dompteuse inspira plus tard Jacques Garnier qui dans la revue Le Cirque dans l’Univers lui consacra un long article.
Artiste jusqu’au bout des ongles, elle s’était composé un personnage d’intrépide dominatrice de fauves aux couleurs exotiques.
Ses affiches annonçaient la première dompteuse du monde. Soignant sa publicité, elle prit le nom de Nouma Hawa et se disait originaire de Constantine. Comme à l’accoutumée, les journalistes reprirent scrupuleusement ses dires. Il y en eut même un, surenchérissant sur ses éminents confrères, qui écrivit qu’elle venait de Constantinople !
La Vénus du XIXe siècle
La réalité est autre. Selon les recherches généalogiques de Paul Salasca, la capiteuse Nouma Hawa s’appelait Marie Louise Grenier et était née à Peauvres, dans l’Ardèche, le 28 novembre 1845. Son père était tailleur de pierre. Nous sommes donc loin des fables orientales au son de la darbouka, de la ghaita et des crotales.
Lorsqu’elle rencontra le dompteur Claude Pernet, elle exerçait le métier de lingère. Ce dernier dirigeait une ménagerie qui se produisait dans les foires.
La belle Marie Louise se maria, le 7 janvier 1868, avec le belluaire et devint dompteuse à son tour.
La ménagerie foraine Pernet s’installait dans les foires comme celles d’Orléans, Bourges ou Angoulême. Dans cette dernière ville, elle était annoncée comme étant La Vénus du XIXe siècle.
Nouma Hawa au Cirque Hiver
Victor Franconi l’engagea au Cirque d’Hiver, le 29 janvier 1882. Le lendemain, F. Bourgeat écrivit dans L’Entracte :
« … Mademoiselle Nouma Hawa est une fort belle personne brune, grande, bien faite, portant avec aisance un costume oriental… »
Le journaliste décrivit ensuite, en détail, son entrée de cage, et conclut ainsi :
« .. . Tout Paris ira contempler cet émouvant spectacle qui dépasse l’imagination… »
Les engagements se succédèrent comme au Folies Bergère l’année suivante, où elle fut accrochée par une de ses lionnes. Cependant, elle préférait se produire dans l’établissement de son mari en France, Belgique, Suisse et Italie.
Emotions
À Rome, Claude Pernet fut mordu par un de ses pensionnaires le 10 mars 1883, et suite à un empoissonnement sanguin, décéda deux jours après.
Devenue veuve, Nouma Hawa reprit la direction de la ménagerie et engagea le dompteur Agop pour la seconder.
Deux ans plus tard, elle se remariait avec M. Soulet à Bordeaux, ce qui ne l’empêcha pas de continuer son métier de dompteuse foraine.
Une vie dangereuse
Au cours de ses représentations, elle fut blessée plusieurs fois, comme à Verviers en novembre 1886, à Lausanne en août de l’année suivante et à Bruxelles en mai 1888.
En 1891, sa ménagerie comprenait des animaux exotiques (lama, dromadaire, zèbre et zébu), un éléphant et quatorze lions et lionnes. En Suisse, elle donna des représentations à Genève, Lucerne et Berne.
Continuant de voyager en Helvétie et en Italie, elle faisait équipe avec Il signor Marcel, qui dirigeait les fauves tandis, qu’elle interprétait la danse serpentine à la façon de Loie Fuller.
Après une longue carrière au milieu des lions, elle vendit son établissement forain et se retira en Suisse au bord du lac Léman jusqu’à la fin de ses jours, en 1926.
La fascination de Nouma Hawa
On ne saurait confondre notre dompteuse avec la mignone Mathilda Cajdos qui se faisait appeler la princesse Nouma Hawa. Cette délicate artiste, qui mesurait 82 centimètres, était venue en Europe au début du XXèmesiècle avec la tournée de Buffalo Bill. Certains auteurs ont même écrit qu’elle était dompteuse. Passons…
Revenons à notre Nouma Hawa. Tout au long de sa vie d’artiste, elle est restée, dans l’imaginaire des amateurs de ménageries foraines, comme l’archétype de la dompteuse de rêve. D’un seul regard, elle fascinait tout autant les fauves que les messieurs de la belle époque. Incontestablement, Nouma Hawa est entrée dans la légende.
Belmonte Bates
Sources
- Troublante Nouma Hawa
- Les dompteurs – Henry Thétard.
- Les Reines des Fauves – Henry Thétard – La Revue des deux Mondes – 15/03/1951.
- Forains d’hier et d’aujourd’hui – Jacques Garnier.
- La belle Nouma Hawa – Jacques Garnier – Le Cirque dans l’Univers – n° 55.
- La Vénus du XIXe siècle
- Recherches généalogiques Paul Salasca.
- La Charente – 9/08/1878.
- Au Cirque Hiver
- L’Entracte – F. Bourgeat – 30/01/ 1882.
- Journal Universel – 8/04/1882.
- Cirque d’Hiver, direction Franconi – Dominique Denis – circus-parade.com.
- Emotions
- Storia del Circo – Alessandro Cervelatti.
- Une vie dangereuse
- Foires et forains en Wallonie – Musée de la vie wallonne.
- Nouma Hawa, une gloire circacienne de la Belle Époque – Michel Alain Lagrange cirk/75gmkag.com.
- La fascination de Nouma Hawa
- Stars de Lilliput – Dominique Denis.
- Notes Henry Thétard – Alessandro Cervelatti – Jacques Garnier.