I Clown, le film de Federico Fellini, tourné en 1971, est un long-métrage qui fait maintenant partie des classiques du cinéma mondial.
par Denis Granai
Production
I clowns : Film Italien en couleur, de 92 mn, tourné en 1971.
Société de Production : Leone Cinematrografica – RAI – ORTF – Bavaria Films
Producteurs : Ugo Guerra et Elio Scardamaglia
Réalisation : Federico Fellini
Scénario Federico Fellini et Bernardo Zapponi
Musique : Nino Rota
Image : Dario di Palma
Distribution
Riccardo Billi
Federico Fellini
Gigi Reder
Carlo Rizzo
Giacomo Furia
Dante Maggio
Manrico Bario
Roberto
Georges Loriot
Pierre Etaix
Victoria Chaplin
Jean Baptiste Thiérrée
Anita Ekberg
Maria Bucela
Alvaro Vitali
Souvenirs d’enfance
Federico Fellini aborde ce film comme un faux documentaire, puisqu’il s’agit d’un savant mélange d’enquête, prétexte, avec le cinéaste en personne comme chef d’une petite équipe télé partie faire un reportage afin de recueillir des témoignages, de scènes de fiction situées dans le passé, de reconstitutions poétiques de numéros de Cirque et de mise en scène de spectacles de clowns jusqu’à un finale typiquement fellinien.
Le prologue montre ainsi un double du jeune Federico émerveillé, enthousiaste puis effrayé par le spectacle auquel il assiste avant de s’en échapper en se sauvant. Réminiscence de ce souvenir d’enfance, les clowns lui rappellent des personnages grotesques, voire monstrueux, de son enfance.
Galerie de personnages
Le cinéaste montre dans leur contexte des clochards, des miséreux, des infirmes, des travailleurs pauvres, des vieux villageois, des simplets, des employés de gare passant leur temps à se disputer au point de se taper dessus, des fascistes, des blessés de la Guerre 14-18.
Soit toute une galerie de « gueules » de cinéma qu’affectionne Fellini, qui ne manifeste pas de sentiments négatifs à leur égard. Il ne juge pas, sa vision est presque bon enfant malgré la brutalité et la désolation qui sourdent de ces séquences.
Bouffons du Cirque
Fellini, on le sait, semble même éprouver une sorte de commisération, mâtinée d’ironie, pour ces pauvres hères. Sa volonté est simplement d’évoquer des figures qui ont habité son enfance puis son adolescence et qu’il associe délibérément aux bouffons du cirque.
Car il s’agit bien pour Fellini de tendre un miroir à notre société grâce à ce précipité d’humanité à la fois burlesque, aberrante et violente du quotidien.
Les clowns, s’ils font sourire et parfois rire, renvoient aussi à l’absurdité, à la laideur et à la cruauté du monde.
L’inéluctable I clowns
Le film n’est pas seulement un tendre hommage à des représentants d’un spectacle désuet, il témoigne aussi d’une vision désenchantée de l’humanité qui s’incarne dans ces clowns qui tournent en rond en vociférant, jouent à s’enivrer et à se battre, à la fois naïfs et manipulateurs, égoïstes et généreux, solitaires et animés d’un sentiment communautaire.
Le film s’interroge sans ambages sur la disparition inéluctable des clowns à travers les témoignages recueillis et la mise en scène de certains numéros, qui évoquent autant la vie tumultueuse de personnages en conflit permanent que parfois l’élévation poétique d’êtres qui s’apprêtent à quitter le monde vers un ailleurs apaisé, hors des contingences matérielles.
Denis Granai
Sources
Film : I clowns
Livre : I clowns
Histoire illustrée du cinéma – René Jeanne et Charles Ford.
Cirque au Cinéma – Cinéma au Cirque – Adrian – 1884.
Affiches : I Clowns