Premiers carrousels en France : Extrait du livre Le Cirque en France au XVIII e siècle de Dominique Denis aux Editions Arts des 2 Mondes.

par Dominique Denis

Un spectacle aristocratique

caroseli à Bologne
Giostra dei caroseli à Bologne – A. A.

Carrousels : Depuis l’époque de la Renaissance, les tournois de chevaliers du Moyen Âge devenus obsolètes avaient été remplacés par les carrousels originaires des États italiens… eux-mêmes inspirés des fantasias équestres orientales. Ces nouveaux divertissements royaux et princiers furent initiés par Charles VIII (1483 – 1498) revenant des guerres d’Italie.

Il s’agissait de représentations équestres interprétées par les nobles et leur suite qui se déroulaient sur des grandes places ou dans les châteaux comme Fontainebleau ou Versailles.

Thèmes des carrousels

Sur un thème choisi, mythologique, historique ou allégorique, les seigneurs accompagnés de leurs pages et estafiers, participaient d’abord à une cavalcade, cortège martial hérité des triomphes romains.

Costumés, ils chevauchaient leurs montures richement harnachées. En plus des cavaliers et de la fanfare composés de trompettes et de timbales, des attelages tiraient des chars décorés.

Certains de ces véhicules sur lesquels paradaient des personnages haut en couleur, étaient munis de machineries. Celles-ci leur permettant de se transformer à vue, voire même tirer des feux d’artifices.

Une fois la troupe arrivée dans la lice autour de laquelle avait été aménagé des gradins pour le public, la représentation pouvait commencer.

Jeux hippiques

Course de tête et de bague
Course de tête et de bague – A. A.

En prologue des cavaliers s’essayaient à la quintaine, appelée plus tard, la course au faquin. Cet exercice où les concurrents tentaient de frapper avec leur lance un mannequin mobile sur un pivot. Cette épreuve disparut, peu à peu, dès le début du XVII e siècle et fut remplacée par la course de bagues,. Lors de cette course, le cavalier devait emporter avec sa lance un anneau suspendu à une potence.  

Ensuite, apparut, à partir de 1662, la course de têtes – venue des états germaniques . Cette épreuve où le chevalier, armé d’une lance, d’un dard et d’une épée, devait transpercer successivement une tête en carton d’un Turc, d’un Maure et d’une méduse.

La représentation se terminait par une quadrille (le mot était à l’époque féminin),. Il s’agissait d’un véritable ballet équestre, interprétée par quatre, huit ou douze écuyers.

Le traité de Ménétrier

Le bon déroulement de ces fêtes fut codifié par le Père Claude François Ménétrier dans son Traité des tournois, joutes, carrousels et autres spectacles publics. L’auteur débute par un historique remontant à l’Antiquité du vrai cirque romain, c’est-à-dire les courses de chevaux, des équiries (les joutes équestres), et des naumachies.

Ménétrier consacre un chapitre aux divertissements militaires et spectacles publics des Ottomans, un autre, aux spectacles nautiques, et un suivant, aux mascarades, fêtes populaires et courses burlesques, issues des Saturnales et Bacchanales.

Il décrit en détail toutes les différentes phases des défilés (la pompe), tournois, quadrilles, et des nombreux chars (machines et inventions ingénieuses). Sans aucun doute, cet ouvrage fondamental fait apparaître de façon lumineuse la filiation entre ces représentations anciennes et celle du cirque moderne.

Les Rois font leur cirque

Carrousel - Tuileries - 1662
Carrousel au Palais des Tuileries – juin 1662 – A. A.

Parmi les carrousels qui marquèrent leur époque, il y eut, pour ne citer que les plus remarquables, celui organisé par Henri IV à l’Hôtel de Bourbon en 1605, ou celui de Louis XIII en avril 1612. Edmond Neukomm écrivait à propos de ce dernier :

« … En vérité, ce fut un admirable spectacle que celui de ces fringants seigneurs, tout empanachés et cavalcadant à la lueur des torches et des lanternes. La foule battait des mains à leur passage ; elle fut éblouie par le luxe qu’ils avaient, à cette occasion déployée… »

Dans un futur article, il sera question des carrousels de Louis XIV.

Dominique Denis

Sources

Dictionnaire illustré des mots et locutions du Cirque – Dominique Denis.

Livre : Le Cirque en France au XVIII e siècle – Dominique Denis.

Histoire des chevaux célèbres – Pierre-Jean Baptiste Nougaret.

Les Jongleurs à cheval – Dominique Denis.

Le cheval et la guerre – Collectif.

Une histoire du cheval – Jean-Pierre Digard.

A Pictorial History of Performing Horses – Charles Philip Fox.

Cheval Spectacle – Frédéric Chehu.

Histoire des spectacles(Collectif).

Les spectacles à travers les âges- Collectif.

Performing Horses – Charles Philip Fox.

Spettacolo a cavallo – Giancarlo Pretini.

L’Art de la Cavalerie… Gaspard de Saunier.

Les maîtres de l’équitation classique – André Gérard.

suite

Pratique de l’équitation – Louis-Charles Mercier Dupaty de Clam.

Tratato del modo di volteggiare e saltare il cavallo di legno – Giocondo Baluda.

Vollständieges Fecht, Ringe und voltigier Buch – Johann Georg Paschen.

Les carrousels en France – Stéphane Castellucio.

Traité des tournois, joutes, carrousels et autres spectacles publics-Claude François Ménestrier.

Les Fêtes Célèbres – Frédéric Bernard.

Fêtes et spectacles du vieux Paris – Edmond Neukom.

Carrousels et ballets équestres – Pierre André – Le Cirque dans l’Univers – n° 107.

Les maîtres de l’équitation classique – André Gérard.

Fêtes de Cour et cérémonies publiques – Auguste Rondel.

Circences – Spiele auf Leben und Tod – Rolf von Ende.

À lire

Le Cirque en France au XVIII e siècle – Dominique Denis – Arts des 2 Mondes – Paris – 2013.