À Courtrai, en 1924, débuts du Cirque Amar – Adaptation du livre Les cirques des frères Amar de Dominique Denis aux Éditions Arts des 2 Mondes.
par Dominique Denis
Avant les débuts à Courtrai
Avant leurs débuts officiels à Courtrai, Mustapha Amar acheta le chapiteau de Georges Bonnefoi. C’était un deux mâts, de trente-deux mètres de diamètre.
Pour la tente de trente mètres sur douze de la ménagerie, il obtint un arrangement avantageux de location-vente avec la firme Huet d’Elbeuf.
Il fit l’acquisition de tracteurs Ford et négocia une partie du matériel des Pauwel dont le cirque avait brûlé l’année précédente à Temse, en Belgique. Ce petit établissement forain était dirigé par Charles et son épouse Jeannette. Ils étaient épaulés parleur fille aînée Bertha et Marquis Cohen, le jeune frère de Jeannette. Comme Mustapha s’était lié d’amitié avec cette famille d’artistes originaires de Gand, il réussit à obtenir les appuis nécessaires pour démarrer son entreprise au Benelux.
Les débuts d’Amar à Courtrai
La baraque de la ménagerie Amar fut remisée à Nanterre chez les Bonnefoi.
Après un galop d’essai à Versailles, le cirque et les animaux furent embarqués dans un train spécial affrété par les établissements Aget, à destination de la Belgique.
Pour la Foire de Pâques, le 20 avril 1924, à Kortrijk (Courtrai), sur le Houtmarkt (le Marché au Bois), le public belge put découvrir les débuts circassiens des Amar. D’emblée ce fut un succès !
Pour leurs débuts, l’entreprise fut intitulée : Ménagerie des frères Amar & ses attractions – Madame Veuve Amar & ses Fils – Directeur-Propriétaire.
Au Cirque Amar
L’administration était dirigée par M. Chalando, la régie par Marquis Cohen, le neveu de Charles Pauwel, et l’orchestre était sous l’autorité de M. Nowak.
Les représentations avaient lieu tous les soirs à 20 heures 30, et les matinées, les jeudis, dimanches et fêtes à 15 heures. Le prix d’entrée était de 1 franc. À partir de 10 heures, visite de la ménagerie.
Le spectacle à Courtrai
La première partie était dévolue aux attractions avec une troupe composée des Pauwels qui présentaient un numéro de perche portée et un d’acrobatie au sol.
Les jeunes Renée et Chotachen Courtault voltigeaient à cheval.
La partie clownesque était assurée par Georgey et Harry Foottit, les deux fils du grand Foottit. On trouvait aux agrès, Moralès et sur une plate-forme, le casse-cou à bicyclette Ripert.
Enfin, Amar Aîné présentait les deux éléphants Jenny et Béby.
La deuxième partie était entièrement présentée par les 4 frères Amar dans leurs entrées de cage respectives. Malgré leur jeunesse, ils avaient du métier et surtout du panache. Ils avaient le sens de la présentation. Chacun d’entre eux interprétait un personnage : un dompteur hindou, un cosaque, un officier de marine, un Bédouin du désert… Incontestablement, ils étaient les vedettes du spectacle.
Quelques changements
Par la suite il y eut quelques remaniements au programme, notamment après l’accident survenu au mois d’octobre au cycliste casse-cou Ripert. Le jongleur équilibriste Winsell et la fildefériste Miss Semay furent alors engagés. En fin de première partie, les sauteurs Paul, Antonio et Chotachen Courtault, dit Chottachi, présentèrent un pot pourri de sauts à la grande batoude par-dessus les deux éléphants. Chotachen, appelé également Kostia était un acrobate à cheval de grande classe aussi à l’aise dans les pirouettes que dans le saut périlleux.
Quel succès !
On peut s’interroger sur ce succès. Si l’on regarde les programmations des autres cirques de cette même année, on se rend compte que tous les grands établissements présentent des spectacles de grande qualité avec, en tête d’affiches, des attractions de classe internationales.
Au regard de la programmation du Cirque Amar, il faut reconnaître que leur spectacle ne pouvait soutenir la comparaison avec ces grands établissements européens. Alors, comment expliquer leur succès ?
On sait que le public belge est à la fois chaleureux, cultivé et d’une grande ouverture d’esprit. Dans le cas du spectacle des frères Amar, les spectateurs ont su faire la part des choses. Ils n’avaient pas cherché à comparer, mais plutôt à apprécier l’ambiance du spectacle bien rythmé qui leur était proposé. Ils avaient été sensibles à l’enthousiasme, à la fougue et à la jeunesse des participants.
Files d’attente
Les frères Amar avaient joué, et gagné ! Ne dit-on pas que la chance sourit aux audacieux ? Chaque jour Marie-Gabrielle veuve Ahmed ben Amar tenait la caisse, et devant elle, s’allongeaient d‘interminables files d’attente. Elle n’en croyait pas ses yeux. Grâce à ses fils, son rêve était enfin réalisé.
Mustapha jubilait d’avoir réussi à monter du jour au lendemain un cirque, Amar Aîné était ravi d’être la vedette du spectacle, Ali était tombé amoureux de la jeune écuyère mademoiselle Renée Courtault, et Shérif, le plus jeune dompteur du monde, était devenu la coqueluche des belles Flamandes.
Dominique Denis
Extraits et adaptation du livre Les cirques des frères Amar de Dominique Denis.
Sources – Amar à Courtrai
Entretiens avec Serge.
Courrier Amar – 1/3/1924 – 8/7/1924 – 12/7/1924.
Les frères Amar – René Miquel – Caliban – n° 28.
De Geschiedenis van de belgische circussen – André de Poorter.
Programmes Amar 1924
Depuis l’hôtel de la Duchesse Anne – Ouest-France – 9/11/1961.
Notes André De Poorter et Jacques-Marie Coppée.
Tussen Hemel en Aarde, Kermissen en Circussen in Kortijk – Christian Germonpré.
Der Artist – 1924.
Sur le chemin des grands cirques voyageurs – Adrian.
Le Nouvelliste – mai-juin-octobre 1924.
Affiche Chottachi – collection H. H. J. Linssen.
Cirque au cinéma – Cinéma au cirque – Adrian.
Courrier Louis Claes – 29/8/1924.
Notes Charles Degeldère.
120 ans d’histoire du cirque à Lille – Michel et Vincent Mochez.
Affiches de Gustave Soury
À Lire
Les cirques des frères Amar- Dominique Denis – Arts des 2 Mondes – Aulnay sous Bois – 2006.